On serait toujours presque tenté de "rabaisser" Michel Audiard à ses dialogues vachards et à ses envolées lyriques poilantes. Cinématographiquement installé au panthéon des gars que l'on citerait volontiers, et par coeur, dans les soirées arrosées histoire de bien faire rire son monde, l'homme se révèle rien de moins qu'écrivain. Un vrai. Profond. Mystérieux. Revanchard. Teigneux. Observateur. Drôle. Il faut bien le dire, là, quelle riche idée de voir Denoël rééditer "La nuit..." pourtant paru en 1978. Passé quelque peu inaperçu à l'époque, l'ouvrage mérite pourtant bien plus qu'un détour distrait.
En 1978, Michel Audiard est un homme à genoux. Il a perdu un fils dans un accident de la route. Difficile de ne pas voir là, dans son roman autobiographique, la trame secrète de cet homme qui se retourne alors vers son passé, sa jeunesse et ses morts dans un Paris très Occupé par la guerre. C'est dans la capitale que l'auteur a grandi, se frayant opportunément un chemin pour vivre, côtoyant les amis, les vrais de toujours, les femmes, les amants, les maîtresses, les putes, les cimetières, les bistrots et quelques soldats allemands. Et Audiard est impitoyable, sa mémoire est subjective, alors il renvoie le plus souvent dos à dos collabos professionnels et résistants sur le tard. On est parfois limite dans cette errance du type revenu de tout, xénophobe et malheureux. Mais comme toujours avec lui, il y a la manière. Cette faconde transportante et jouissive, ce style portant à bout de bras les déboires du monde vers le cataclysme ultime, tel Céline à qui il fait immanquablement penser. Car il faut en finir, suggère-t-il au fil des pages. En bon anarchiste de droite, il faut que tout pète, surtout avec la Bombe, la grande... Et que plus rien ne reste pour ne même plus recommencer en plus mal et en plus moche.
On est parfois nauséeux à lire ses personnages et sa Vérité. Mais j'ai paradoxalement aimé ses images, ses métaphores et ses portraits glaviotés du fond de ses nuits embuées. J'ai aimé son indocilités et ses provocations. Le lecteur voyage au pays des Lettres bien troussées pendant que leur auteur détrousse les âmes à coups de latte dans les couilles. Crûment. Pour voir. Pour (re)sentir. Pour s'éberluer du monde qui a depuis si longtemps fait passer l'humanité pour un carnage ambulant. Il est un témoin maladivement horrifié de respirer encore tandis que nous, dans ces pages, nous suffoquons. On s'étonne aussi de voir graviter ces gens dans les années 50, oublieux d'une autre époque, où le grand principe était de surtout sauver sa peau, quoi qu'il en coûte. Sans regrets, sans remords. Une autre époque. Dans cette période de fards et de feintes, Michel Audiard n'a lui rien oublié des revirements, des lâchetés, des immondices, de ces femmes rasées à la Libération par ceux-là même qui avait profité de leurs largesses buccales. Epoque trouble aux héros en plastique. Pour trouver la paix, Audiard va au cimetière déposer quelques fleurs. Il parle à ses morts parce que les vivants n'en valent pas la peine. A la fin des années 70, Audiard est un homme seul avec sa peine, qui traque les souvenirs pour les coucher sur papier et survivre. Au lieu de les dégueuler.
En 1978, Michel Audiard est un homme à genoux. Il a perdu un fils dans un accident de la route. Difficile de ne pas voir là, dans son roman autobiographique, la trame secrète de cet homme qui se retourne alors vers son passé, sa jeunesse et ses morts dans un Paris très Occupé par la guerre. C'est dans la capitale que l'auteur a grandi, se frayant opportunément un chemin pour vivre, côtoyant les amis, les vrais de toujours, les femmes, les amants, les maîtresses, les putes, les cimetières, les bistrots et quelques soldats allemands. Et Audiard est impitoyable, sa mémoire est subjective, alors il renvoie le plus souvent dos à dos collabos professionnels et résistants sur le tard. On est parfois limite dans cette errance du type revenu de tout, xénophobe et malheureux. Mais comme toujours avec lui, il y a la manière. Cette faconde transportante et jouissive, ce style portant à bout de bras les déboires du monde vers le cataclysme ultime, tel Céline à qui il fait immanquablement penser. Car il faut en finir, suggère-t-il au fil des pages. En bon anarchiste de droite, il faut que tout pète, surtout avec la Bombe, la grande... Et que plus rien ne reste pour ne même plus recommencer en plus mal et en plus moche.
On est parfois nauséeux à lire ses personnages et sa Vérité. Mais j'ai paradoxalement aimé ses images, ses métaphores et ses portraits glaviotés du fond de ses nuits embuées. J'ai aimé son indocilités et ses provocations. Le lecteur voyage au pays des Lettres bien troussées pendant que leur auteur détrousse les âmes à coups de latte dans les couilles. Crûment. Pour voir. Pour (re)sentir. Pour s'éberluer du monde qui a depuis si longtemps fait passer l'humanité pour un carnage ambulant. Il est un témoin maladivement horrifié de respirer encore tandis que nous, dans ces pages, nous suffoquons. On s'étonne aussi de voir graviter ces gens dans les années 50, oublieux d'une autre époque, où le grand principe était de surtout sauver sa peau, quoi qu'il en coûte. Sans regrets, sans remords. Une autre époque. Dans cette période de fards et de feintes, Michel Audiard n'a lui rien oublié des revirements, des lâchetés, des immondices, de ces femmes rasées à la Libération par ceux-là même qui avait profité de leurs largesses buccales. Epoque trouble aux héros en plastique. Pour trouver la paix, Audiard va au cimetière déposer quelques fleurs. Il parle à ses morts parce que les vivants n'en valent pas la peine. A la fin des années 70, Audiard est un homme seul avec sa peine, qui traque les souvenirs pour les coucher sur papier et survivre. Au lieu de les dégueuler.
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