J’ai adoré ce film qui attaque au lance-flammes ces sociétés
scandinaves que l’on nous montre le plus souvent comme des exemples en Europe.
Exemple de tolérance, d’accueil, d’esprit d’ouverture ? Pas si simple. Et pas
si rose. Tout comme la littérature policière du coin qui bat en brèche le plus
souvent l’eldorado social et la mixité, les relations humaines et familiales,
et l’idée même de la liberté de tout un chacun. The Square s’attaque à tout,
tranquillement, laissant des mines anti-personnelles partout sur le chemin. Il
n’y a plus qu’à marcher dessus. L’art omniprésent, qui plus est contemporain,
n’est là-dedans qu’un prétexte. Parce qu’au final quoi de plus clivant, de plus
arrogant, de plus excluant, de plus destructeur de l’égalité rabâchée ? Tout y est.
Décortiqué, c’est selon, soit à la hache, impitoyable, soit par petites
touches, un détail : le monde du travail, la place des enfants dans la société
(et l’entreprise, oui) les relations hommes-femmes, le sexe (cette scène
incroyable et poilante), la capitale contre la banlieue, les riches contre les
modestes (j’ai cru voir Chaplin dans un Roi à New York), les lettrés contre les
« animaux », les « hors-jeux » et même la publicité (aaaaaah cette réponse au
brief par le duo commercial-créatif). Puis, cette scène incroyable de la
conférence de presse (je ne vais pas spoiler) me semble l’essence même du film
et des paradoxes qu’il s’escrime à pointer du doigt. Là où ça fait vachement
mal quand la plaie est à vif. The Square a été récompensé par la Palme d’Or à
Cannes. Je ne sais pas si cela est mérité ou pas. En tout cas, il y a ceux qui
au sortir de la salle ont trouvé ça « insupportable ». J’ai trouvé « ça »
gonflé, chirurgical, drôle, flippant, gênant, asphyxiant, beau (toujours cette
lumière scandinave si tant tellement cinématographique), percutant, sauvage et
ovniesque. Tout ce que je demande à un film.
lundi 23 octobre 2017
lundi 17 octobre 2016
« Juste la fin du monde » de Xavier Dolan
Déçu. Très. Quand je vais voir « Juste la fin du monde »
de Xavier Dolan, c’est avec en tête son précédent et éblouissant film, « Mommy ».
J’y vais cependant un peu à reculons, le casting maousse costaud pour les uns est
pour moi, a priori, rien de moins qu’inquiétant. Et comme je le craignais, je
déchante dès les premières vingt minutes. Une gêne incroyable. Vincent Cassel
hystérise, Léa Seydoux feint (mal) l’ado qu’elle n’est plus, Marion Cotillard
bredouille avec un insupportable tic qui devient technique de jeu… Nathalie
Baye sauve un peu les apparences, quoique, tandis que Gaspard Ulliel tire son
épingle du jeu en étant le silencieux de service, ce héros. Alors quoi ? Chacun
joue sa partition dans son coin. Puis, je n’ai pas compris. Pourquoi tout ça,
pourquoi cette hystérie, pourquoi ces règlements de compte ? Pourquoi ce
retour à OK Corral? Il n’y a pas de clé(s) qui nous permettent de nous
installer dans cette famille qui s’est détruite d’une absence de 12 ans. Des
explications ? Non. Un coup de téléphone énigmatique. Des promesses faites,
mais on ne sait pourquoi. Au final, l’impression d’acteurs un brin perdus
malgré une mise en scène, qui là, ne souffre d’aucune approximations. Gros
plans et regards fulgurants. Poésie. Le temps qui passe. La scène de la voiture
avec Cassel-Ulliel oscille et hésite entre perfectude et la
consternation. Bizarre. Et je me suis dit qu’en fait, c’est un film « américain »
avec ses affects, ceux de tout au fond, qui nous échappent, à nous Européens. Et
flanquer là-dedans des Français, il y avait dès le départ comme un non-sens,
comme un univers d’écart. Oh, je sais, on aurait pu se dire qu’être acteur, c’est
se mettre dans la peau de n’importe qui. Qu’un réalisateur avec ce talent inouï…
Ben non, pas là, à cet instant précis, pendant 95 minutes. Déçu. Très.
vendredi 19 février 2016
"Printemps 76" de Vincent Duluc - Edtions Stock
Je viens de finir « Printemps 76 » de Vincent Duluc, journaliste à L’Equipe de son état. C’était un étrange voyage. A Saint-Etienne. Là où le foot français a commencé à sortir de sa torpeur et de son indigence dans laquelle il était plongé depuis 1958 quand l’équipe de France de foot atteignit la 3ème place de la Coupe du Monde. Saint-Etienne, donc. Là où rien que le nom résonnait dans ma tête de ...jeune footballeur de 8-9 ans plein de rêves de victoires. En Seine-et-Marne. Jouer à être plus que de raison Curkovic, Bathenay, Lopez, Piazza, Larqué, Rocheteau, Revelli, Janvion… Ce livre, c’était un voyage au pays de mon enfance où je ne voyais de feu Roger Rocher qu’un gars qui fumait sa pipe, d’Herbin un type mystérieux, mutique et qui faisait un peu peur. Un peu hautain, aussi. Je n’ai jamais mis les pieds à Saint-Etienne, mais j’ai toujours eu cette envie folle de trôner sur les bancs ou le kop de Geoffroy-Guichard. Et de vibrer, retrouver les saveurs douces d’une insouciance, de supporter et de faire vivre mes envies d’ailleurs. Loin. Vincent Duluc a réveillé tout ça. Son récit de jeune gars du coin est rudement nostalgique, direct, franc. Il a vu tout ça. Il a vu la ville grandir, son stade bouillir dans sa vie d’ado. Il a aussi voulu partir pour sans cesse y revenir. En journaliste sportif. Plus tard. Cette autobiographie en creux distille des portraits émouvants et parfois sans pitié d’une faune footballistique mêlant joueurs, dirigeants et un public acquis toute à la cause d’un club qui ira le 12 mai 1976 en finale de ce que l’on appelait alors la Coupe des clubs champions, contre le Bayern de Munich de Franz Beckenbauer. Une finale perdue. Une finale qui sera un titre de gloire indélébile. Bien sûr, Saint-Etienne en 1976, le football, ça ne dira pas grand-chose aux plus jeunes… Mais peu importe. « Printemps 76 » est comme un marque-page d’une vie qui expliquerait sans doute un peu qu’un maillot du club traine encore dans mon armoire, et que chaque week-end, les premiers résultats que je scrute, ce sont ceux de l’Association sportive de Saint-Etienne.
samedi 1 septembre 2012
Lectures d'été : Jauffret, Gendron, Férey, Shteyngart, Auster et Tesson...
Blog en friche. Blog à défricher.
Il y a maintenant quelques mois que je n'ai pas œuvrer en ces lieux pour vous
parler lecture. Qu'à cela ne tienne, vacances terminées pour moi, voici les
livres qui m'ont accompagnés pendant cette période. Et cela commence par un
choc, un coup de poing, comme on veut. "Claustria " de Régis Jauffret
(Editions du Seuil) n'a pourtant rien d'un livre de vacances...S'appuyant sur
l'histoire vraie de Josef Fritzl, tortionnaire et violeur de sa propre fille
enfermée dans la cave familiale dans une petite ville d'Autriche pendant... 24
années, Jauffret prévient d'entrée "ce livre n'est autre qu'un roman,
fruit de la création de son auteur". On plonge dans l'horreur où se
mélangent claustrophobie, la "vie" au jour le jour, viol,
humiliation, "petits bonheurs", naissances... Le lecteur, tour à
tour, étouffe, se fascine, se perd, dégueule, tente de comprendre les ressorts
de cette vie pour (presque) rien pendant que l'auteur trace la route de son
texte froid qui nous prend par la main pour nous emmener avec lui dans cette
cave humide, glaciale et brûlante au gré des saisons. Déjà aux prises avec un
fait divers avec son livre "Sévère" (Editions du Seuil),
Régis Jauffret signe là un roman immersif époustouflant.
Pour se remettre de ce voyage
dans l'horreur "humaine", Sébastien Gendron et son "Quelque
chose pour le week-end" (Editions Baleine) a les atouts pour se replonger
dans la légèreté du polar un peu branque. Située dans une petite ville anglaise
du bord de mer, l'action mélange drogue, pingouins envahisseurs, chantage et
petits meurtres entre gens de (très) bonne compagnie avec un ton et un humour
qui n'est pas sans rappeler l'univers cinématographique des frères Ethan et
Joel Coen. Il y a là matière à franchement rigoler avec un roman iconoclaste
d'un auteur dont je suis fan depuis "Le Tri sélectif des ordures"" en
2008 ou encore "Taxi, take off & landing" en 2010.
Et une bonne poilade par les temps qui courent...
Ces temps qui passent alors que
l'oubli est impossible. Après nous avoir fait "visiter" l'Afrique du
Sud avec "Zulu" et la Nouvelle-Zélande avec "Haka",
l'auteur a déposé cette fois son sac en Argentine avec "Mapuche"
(Série Noire Gallimard). S'imprégnant de l'histoire contemporaine du pays,
Caryl Férey livre un thriller extrêmement bien documenté mettant en scène un
avocat des causes perdues enquêtant avec une jeune artiste sculptrice
sur l'assassinat d'un travesti. On plonge alors dans la patrie de Maradona où
se mêlent les souvenirs et les conséquences de la dictature militaires des
années 70, dans les affres politico-friquées d'années de plomb où tortures,
viols et vol de bébés étaient monnaie courante. L'auteur entraîne le lecteur
dans une enquête qui n'est pas seulement celle d'un meurtre, mais la recherche
d'une rédemption de tout un pays traumatisé par son Histoire, cette
indispensable course à la mémoire, à la compréhension et à la justice des
hommes qui ont oublié leur humanité. L'implacable scénario de ce roman
n'échappe pas, parfois, aux clichés amoureux, mais il n'en est pas moins
un témoignage poignant et indispensable d'une dictature qui a laissé en
Argentine des plaies pas encore cicatrisées. Un livre d'Histoire et un thriller
passionnant.
Plus passionnant, en tout cas,
que "Absurdistan" de Gary Shteyngart (Editions Points). Cet auteur
américain né en Russie (Leningrad) nous livre une histoire un peu bordélique
qui voit le fils d'un parrain de la mafia russe installé aux États-Unis coincé
en Russie parce que son père vénéré par toutes les crapules locales a assassiné
un homme d'affaire américain. Sur place, perdu, le fils découvre un pays
exsangue, en pleine révolution, où ses rencontres rivalisent de couardises, de
mensonges et autres trafics aussi bien d'amour, d'armes, que d'espèces
sonnantes et trébuchantes. Le lecteur s'y perd un peu, ne sachant pas très bien
à quoi tout cela rime. Le personnage principal sombre peu à peu, souvent naïf,
dans un pays qu'il ne comprend pas. On s'ennuie un peu de cette débauche
caricaturale de sentiments exacerbés, de ces bras qui moulinent pour
une histoire qui se voudrait iconoclaste et qui n'entraîne le plus souvent que bâillements un peu bruyants.
Tout le contraire de "Sunset
Park" de Paul Auster (Actes Sud). Après le remarquable
"Invisible",
l'auteur m'a une fois encore conquis avec cette errance maladive de Miles, son
"héros". Se sentant coupable de la mort de son demi-frère, il a tout
quitté, jusqu'à lui-même. Posant ses valises au gré du hasard, il posera des coins
de sa vie dans des villes loin de chez lui avant de sentir, une fois amoureux
pour de bon, le besoin de revenir à New York expliqué sa disparition à son père
et sa mère, une star du cinéma et du théâtre. Auster nous trimballe comme il
sait si bien le faire dans l'âme de ses personnages. Au gré des chapitres, il
nous présente les ressorts de chacun, les manques, les ambitions, les
abandons... Un père, une mère. Mais aussi les locataires d'un même immeuble
qu'ils squattent. Ils sont le reflet d'une humanité qui se cherche, d'un
désespoir devant les sourires de façade. En brossant ces portraits-là, l'auteur
s'ingénie encore et encore à tenter d'expliquer ce qui ne l'est pas forcément
toujours. Ces touches miraculeuses de vérité, ou ce qui s'en approche, rendent
ce roman à la fois passionnant et émouvant. Ce voyage intérieur, sans esbroufe,
cache cet impérial besoin d'être soi le moins mal possible. Une véritable réussite
!...
Enfin, direction la Russie (encore !) avec
Sylvain Tesson pour "Dans les forêts de Sibérie" (Gallimard). L'homme
a décidé pendant six mois de vivre dans une petite bicoque au bord du lac
Baïkal, et rien d'autre. Ou plutôt si, accompagné de bouteilles de vodka
(beaucoup), de cigares et surtout d'une pile de livres, l'auteur narre son
périple au jour le jour, loin de tout, surtout des gens. Cette solitude voulue
est ainsi le prétexte à un retour au source. Celle de l'Homme confronté à une
nature libre et brutale, parfois agressive, souvent belle, qui ne se perd
jamais dans les fioritures. A la recherche de lui-même, Sylvain Tesson raconte
ses journées où se mêlent la dureté du temps qui passe, la lecture, l'alcool, le
pragmatisme de la survie et contemplation des moments beaux. Du fond de son
exil, l'auteur oublie son passé de citadin occidental pour se consacrer aux
tâches ingrates du jour et écrit son journal intime qui n'est plus que son seul
compagnon. Au final, Sylvain Tesson vit sa solitude comme une bouée de
sauvetage. Curieusement, il ne raconte pas tant que cela les mauvais moments,
les galères, les baisses de moral, comme si ce voyage intérieur était une
simple expérience ponctuelle qui trouvera son épilogue avec le retour à la
"civilisation". Étrange sensation que celle du lecteur qui a en
refermant le livre le sentiment d'avoir assisté à un voyage sponsorisé, presque
trois étoiles... Un trois étoiles au normes locales, certes.
mercredi 14 mars 2012
"Open bar" de Benoît Schmider - Steinkis éditions
Benoît Schmider, ex publicitaire talentueux, a sombré. A pic. Irrémédiablement. Etudiant, expatrié, jeune adulte puis, donc, jeune publicitaire, il a trimballé sa bonne humeur et sa connerie à coups de substances alcoolisées qui l'ont détruit. C'est la trame de ce très court récit qui se lit d'une gorgée, pas même le temps entre un apéritif et un digestif.
Parce que l'auteur ne se ménage pas lorsqu'il raconte sa dérive. Branleur inconscient, il porte un regard lucide, sans glaçons, sur son naufrage. Entre les potes, les filles, les soirées et un métier qui n'est plus qu'un prétexte, et ne devient par là même que la rampe de lancement d'une noyade annoncée, l'auteur reprend le fil de sa courte vie de Publicitaire en brossant une carte des vains qui n'est plus qu'un autoportrait seulement quelques fois drôle, mais le plus souvent pathétique. En effet, le lecteur peine toute de même à sourire. C’est bien connu, le saoul se marre bien plus que le sobre qui n’y comprend rien. Pas dans le mood.
Sur fond de tout petit Pouvoir et de fric en cascade (Benoît Schmider est alors devenu quelqu'un d'important dans son métier), c'est l'aventure d'un homme bien seul, dont les spectateurs un peu vautour assiste à la chute. Ce livre est un troublant témoignage pour les estomacs délicats, non pas seulement parce qu'il narre la descente aux Enfers de quelqu’un pris dans les démons de l'alcool, mais parce qu'il dresse aussi, en creux, le portrait guère flatteur d'un univers professionnel dans lequel je navigue moi-même depuis plus de dix ans.
Parce que l'auteur ne se ménage pas lorsqu'il raconte sa dérive. Branleur inconscient, il porte un regard lucide, sans glaçons, sur son naufrage. Entre les potes, les filles, les soirées et un métier qui n'est plus qu'un prétexte, et ne devient par là même que la rampe de lancement d'une noyade annoncée, l'auteur reprend le fil de sa courte vie de Publicitaire en brossant une carte des vains qui n'est plus qu'un autoportrait seulement quelques fois drôle, mais le plus souvent pathétique. En effet, le lecteur peine toute de même à sourire. C’est bien connu, le saoul se marre bien plus que le sobre qui n’y comprend rien. Pas dans le mood.
Sur fond de tout petit Pouvoir et de fric en cascade (Benoît Schmider est alors devenu quelqu'un d'important dans son métier), c'est l'aventure d'un homme bien seul, dont les spectateurs un peu vautour assiste à la chute. Ce livre est un troublant témoignage pour les estomacs délicats, non pas seulement parce qu'il narre la descente aux Enfers de quelqu’un pris dans les démons de l'alcool, mais parce qu'il dresse aussi, en creux, le portrait guère flatteur d'un univers professionnel dans lequel je navigue moi-même depuis plus de dix ans.
lundi 2 janvier 2012
Top et Flop 2011 de MON cinéma
A l'image de mes petits camarades de clapmag.fr, je m'essaie cette année aux Top et Flop cinéma de l'année 2011.
Dans mon, Top 10, en n°10, je place "Carnage" de Roman Polanski. Un huis clos un brin étouffant, parfois "trop américain" dans ses préoccupations, qui voit deux couples régler leurs propres comptes sur le dos de leurs enfants. Un ball-trap sournois et remarquablement mis en scène par Polanski.
En n°9, place à "Winter's Bone" de Debra Granik. Une descente vertigineuse dans l'Amérique profonde qui n'est pas sans rappeler l'épatant "Frozen River" de Courtney Hunt. Un regard impitoyable sur le bord du gouffre de personnages aux abois avec quelques espoirs en coin. Mais pas beaucoup. Une jeune actrice ébouriffante, Jennifer Lawrence, dont on reparlera sûrement.
N°8, "Melancholia" de Lars Von Trier. Un casting miraculeux pour une fin du monde en ligne de mire. C'est tendu et auto-destructeur,mais fichtrement attirant comme un vertige. Un Von Trier du meilleur cru.
Le n°7 est la surprise du chef de fin d'année : "L'Irlandais" de John Michael McDonagh. Une comédie policière tordante qui voit l'Irlande s'opposer au(x) reste(s) du monde à coups de griffes anti-anglaises, d'accent au couteau et de répliques massacrantes. Un grand bonheur de spectateur, même si le scénario n'a rien d'une mise en abîme du cinéma mondial. Mais on s'en fout, avec ce pays-là et ces acteurs-là, on se régale.
"Easy Money" de Daniel Espinosa s'installe à la 6ème place de mon Top. Contrairement à ce que l'on pourrait penser de prime abord, ce film... suédois est un long-métrage ambitieux qui dévoile des pans d'une société scandinave mal connue : racisme, crapulerie, banditisme, communautarisme, petites frappes... Tout est fluide dans ce polar noir qui cache son esthétisme quasi-parfait.
Un Top sans que figurent les frangins Joel et Ethan Coen ne serait pas un vrai Top. C'est donc "True Grit" qui déboule en 5ème place. Ce remake d'un western réalisé par Henry Henry Hathaway (1969) d'après un livre de Charles Portis, a tous des ingrédients qui font les recettes des frères Coen : des gueules, des incompréhensions, des quiproquos, de l'humour et une mise en scène archi-maitrisée dans une lumière éblouissante. Une grande année pour les Coen.
"Polisse", n°4. Maïwen, la réalisatrice, montre là tout l'étendue de son talent d'observatrice. Mais elle sait également montrer et raconter ses personnages. A coups de saynètes qui racontent des itinéraires parfois d'une extrême lourdeur, elle arrive à ne pas "pathosiser" et en rester là, juste ce qu'il faut. Tour de force pour un film qui brasse par ailleurs un casting maousse costaud.
N°3 : "Incendies" de Denis Villeuneuve. Un vrai coup de coeur pour une découverte presque par hasard. Un film à la mécanique bien huilée qui traverse les années, les passés troubles... L'histoire d'une vie et de ses secrets où un frère et une soeur se prennent au jeu de savoir qui ils sont. Un choc.
"Drive" de Nicholas Winding Refn, n°2. On ne pourrait presque ne rien en dire, tellement ce film peu bavard représente le cinéma dans son essence même... Une histoire, un personnage, une mise en scène. Tout y est à sa place, sans défaut. Dans cette atmosphère, le réalisateur prouve une fois de plus qu'il est probablement l'un des meilleurs de sa génération... J'attends déjà son suivant avec une extrême impatience.
The tree of life, de Terrence Malick. Ce n°1 de mon Top ne souffre d'aucune contestation à mes yeux. Malgré les critiques et les rejets qu'il suscite, ce film nous rappelle qu'aller au cinéma c'est être invité à voir une oeuvre d'art. Une démarche artistique au même titre que visiter une exposition de peinture, écouter une symphonie, etc. Tout dans Tree of life est un appel aux sensations, aux souvenirs, à notre présent... Au retour sur nos propres interrogations, sur ce que nous sommes dans ce monde. Des images sublimes, un film qui prend son temps en instillant ses émotions, ses regards, ses abandons. Malick touché par la Grâce. Et nous avec.
Et dans les Flop 2011, alors ? Inutile d'en faire des tonnes, mais franchement quelle déception le "Somewhere" de Sofia Coppola. Un film mortifère qui place la réalisatrice, jusqu'alors sur un piédestal,parmi les curiosités avec son prochain film. Saura-t-elle sortir du guêpier complaisant dans lequel elle s'est elle-même fourrée ? Pourtant très attendu,"Ma part du gâteau" de Cédric Klapisch ne m'a pas vraiment convaincu. Une sensation que le réalisateur idéalise un monde qu'il ne connait pas, ou peu. Comme une déconnexion. Etrange.
Que dire de "Minuit à Paris" de Woody Allen ? Ben pas grand chose, justement. Blindé de clichés français, le film paresse alors qu'il devrait être douillet. "Contagion" de Steven Soderbergh devait quant à lui sortir le réalisateur de l'ornière de l'oubli. N'ayant plus trop la main sur ces derniers films, on pouvait fonder quelques espoirs d'un renouveau. Peine perdue, son film n'est que mécanique, certes bien menée, mais qui manque singulièrement de personnages et d'humanité. Elle aurait sûrement fait un très bon documentaire, cette "Contagion". J'adore Michel Gondry et sa folie, alors pourquoi ne pas lui trouver quelques circonstances atténuantes pour "Green Hornet". Loupé ! On cherche en vain cette folie. Gondry a vendu son âme à Hollywood. En attendant mieux, peut-être... Et pour finir, deuxfilms cons : "Thor" de Kenneth Branagh et "Cow boys et envahisseurs" de Jon Favreau. Mais qui suis-je donc allé faire dans ces galères ?
Dans mon, Top 10, en n°10, je place "Carnage" de Roman Polanski. Un huis clos un brin étouffant, parfois "trop américain" dans ses préoccupations, qui voit deux couples régler leurs propres comptes sur le dos de leurs enfants. Un ball-trap sournois et remarquablement mis en scène par Polanski.
En n°9, place à "Winter's Bone" de Debra Granik. Une descente vertigineuse dans l'Amérique profonde qui n'est pas sans rappeler l'épatant "Frozen River" de Courtney Hunt. Un regard impitoyable sur le bord du gouffre de personnages aux abois avec quelques espoirs en coin. Mais pas beaucoup. Une jeune actrice ébouriffante, Jennifer Lawrence, dont on reparlera sûrement.
N°8, "Melancholia" de Lars Von Trier. Un casting miraculeux pour une fin du monde en ligne de mire. C'est tendu et auto-destructeur,mais fichtrement attirant comme un vertige. Un Von Trier du meilleur cru.
Le n°7 est la surprise du chef de fin d'année : "L'Irlandais" de John Michael McDonagh. Une comédie policière tordante qui voit l'Irlande s'opposer au(x) reste(s) du monde à coups de griffes anti-anglaises, d'accent au couteau et de répliques massacrantes. Un grand bonheur de spectateur, même si le scénario n'a rien d'une mise en abîme du cinéma mondial. Mais on s'en fout, avec ce pays-là et ces acteurs-là, on se régale.
"Easy Money" de Daniel Espinosa s'installe à la 6ème place de mon Top. Contrairement à ce que l'on pourrait penser de prime abord, ce film... suédois est un long-métrage ambitieux qui dévoile des pans d'une société scandinave mal connue : racisme, crapulerie, banditisme, communautarisme, petites frappes... Tout est fluide dans ce polar noir qui cache son esthétisme quasi-parfait.
Un Top sans que figurent les frangins Joel et Ethan Coen ne serait pas un vrai Top. C'est donc "True Grit" qui déboule en 5ème place. Ce remake d'un western réalisé par Henry Henry Hathaway (1969) d'après un livre de Charles Portis, a tous des ingrédients qui font les recettes des frères Coen : des gueules, des incompréhensions, des quiproquos, de l'humour et une mise en scène archi-maitrisée dans une lumière éblouissante. Une grande année pour les Coen.
"Polisse", n°4. Maïwen, la réalisatrice, montre là tout l'étendue de son talent d'observatrice. Mais elle sait également montrer et raconter ses personnages. A coups de saynètes qui racontent des itinéraires parfois d'une extrême lourdeur, elle arrive à ne pas "pathosiser" et en rester là, juste ce qu'il faut. Tour de force pour un film qui brasse par ailleurs un casting maousse costaud.
N°3 : "Incendies" de Denis Villeuneuve. Un vrai coup de coeur pour une découverte presque par hasard. Un film à la mécanique bien huilée qui traverse les années, les passés troubles... L'histoire d'une vie et de ses secrets où un frère et une soeur se prennent au jeu de savoir qui ils sont. Un choc.
"Drive" de Nicholas Winding Refn, n°2. On ne pourrait presque ne rien en dire, tellement ce film peu bavard représente le cinéma dans son essence même... Une histoire, un personnage, une mise en scène. Tout y est à sa place, sans défaut. Dans cette atmosphère, le réalisateur prouve une fois de plus qu'il est probablement l'un des meilleurs de sa génération... J'attends déjà son suivant avec une extrême impatience.
The tree of life, de Terrence Malick. Ce n°1 de mon Top ne souffre d'aucune contestation à mes yeux. Malgré les critiques et les rejets qu'il suscite, ce film nous rappelle qu'aller au cinéma c'est être invité à voir une oeuvre d'art. Une démarche artistique au même titre que visiter une exposition de peinture, écouter une symphonie, etc. Tout dans Tree of life est un appel aux sensations, aux souvenirs, à notre présent... Au retour sur nos propres interrogations, sur ce que nous sommes dans ce monde. Des images sublimes, un film qui prend son temps en instillant ses émotions, ses regards, ses abandons. Malick touché par la Grâce. Et nous avec.
Et dans les Flop 2011, alors ? Inutile d'en faire des tonnes, mais franchement quelle déception le "Somewhere" de Sofia Coppola. Un film mortifère qui place la réalisatrice, jusqu'alors sur un piédestal,parmi les curiosités avec son prochain film. Saura-t-elle sortir du guêpier complaisant dans lequel elle s'est elle-même fourrée ? Pourtant très attendu,"Ma part du gâteau" de Cédric Klapisch ne m'a pas vraiment convaincu. Une sensation que le réalisateur idéalise un monde qu'il ne connait pas, ou peu. Comme une déconnexion. Etrange.
Que dire de "Minuit à Paris" de Woody Allen ? Ben pas grand chose, justement. Blindé de clichés français, le film paresse alors qu'il devrait être douillet. "Contagion" de Steven Soderbergh devait quant à lui sortir le réalisateur de l'ornière de l'oubli. N'ayant plus trop la main sur ces derniers films, on pouvait fonder quelques espoirs d'un renouveau. Peine perdue, son film n'est que mécanique, certes bien menée, mais qui manque singulièrement de personnages et d'humanité. Elle aurait sûrement fait un très bon documentaire, cette "Contagion". J'adore Michel Gondry et sa folie, alors pourquoi ne pas lui trouver quelques circonstances atténuantes pour "Green Hornet". Loupé ! On cherche en vain cette folie. Gondry a vendu son âme à Hollywood. En attendant mieux, peut-être... Et pour finir, deuxfilms cons : "Thor" de Kenneth Branagh et "Cow boys et envahisseurs" de Jon Favreau. Mais qui suis-je donc allé faire dans ces galères ?
samedi 19 novembre 2011
"Corinne Luchaire, un colibri dans la tempête" de Carole Wrona - Editions La Tour Verte
Corinne Luchaire a 17 ans en 1938 lorsqu'elle balbutie sa carrière d'actrice avec un premier et énorme succès, "Prison sans barreaux" réalisé par Léonide Moguy. Elle a aussi 19 ans en 1940. Elle est surtout la fille de Jean Luchaire, grand patron de presse collaborationniste qui sera jugé, condamné à mort à la Libération puis fusillé en février 1946...
Émerveillée par les lambris des palais qui s'ouvrent à elle, elle s'étourdit de paillettes. La vie est facile pour une jeune femme inconséquente et parfois superficielle qui n'est qu'indifférence face au monde en train de vaciller dans les ténèbres pour quelques années encore. A l'heure où certains "enfants" de son âge sont dans le maquis ou quémandent le bonheur simple d'être de leur âge , Paris est sous Occupation allemande. La famille Luchaire s'arc-boute sur ses quelques privilèges, festoie, convaincue que la paix et l'entente avec l'ennemi valent mieux que toutes les guerres. Dans ces troubles, c'est le Tout-Paris artistique, journalistique et politique que Corinne Luchaire côtoie de son jeune âge. L'envie folle de vivre ses 20 ans, de se perdre dans le tourbillon d'une célébrité naissante qui lui feront enchainer quelques films seulement, sept en tout entre 1938 et 1940 ( dont "Conflit", "Le déserteur", "Le dernier tournant", "Cavalcade d'amour" et "L'intruse" sorti en France en 1943). Frappée d'indignité nationale, elle mourra de tuberculose alors qu'elle n'aura pas encore 29 ans.
Carole Wrona excelle dans la description de cette période artistique étrange que finalement peu de livres de cinéma évoquent. Le voyage dans ce passé est l'histoire d'une jeune femme qui n'a que son rêve en poche : devenir une star du 7ème Art. En véritable historienne, et parfois en romancière qui s'imagine les pensées de l'actrice, l'auteur de ce livre très documenté ne condamne ni ne juge son "héroïne" perdue, dont le physique atypique de grande blonde effilée traverse l'écran comme un diamant à travailler. C'est avec un talent encore maladroit que Corinne Luchaire séduit les critiques, fait les couvertures de magazine spécialisés, et attire les spectateurs qui ont besoin chaque jour de sortir de leurs torpeurs. Pour le lecteur, toutefois, le trouble est insistant : un destin romanesque et cinématographique, certes, mais Corinne Luchaire était-elle une grande actrice ? Restera-t-elle dans les mémoires indépendamment de ses errements ? L'Histoire, celle du cinéma cette fois, a tranché.
Émerveillée par les lambris des palais qui s'ouvrent à elle, elle s'étourdit de paillettes. La vie est facile pour une jeune femme inconséquente et parfois superficielle qui n'est qu'indifférence face au monde en train de vaciller dans les ténèbres pour quelques années encore. A l'heure où certains "enfants" de son âge sont dans le maquis ou quémandent le bonheur simple d'être de leur âge , Paris est sous Occupation allemande. La famille Luchaire s'arc-boute sur ses quelques privilèges, festoie, convaincue que la paix et l'entente avec l'ennemi valent mieux que toutes les guerres. Dans ces troubles, c'est le Tout-Paris artistique, journalistique et politique que Corinne Luchaire côtoie de son jeune âge. L'envie folle de vivre ses 20 ans, de se perdre dans le tourbillon d'une célébrité naissante qui lui feront enchainer quelques films seulement, sept en tout entre 1938 et 1940 ( dont "Conflit", "Le déserteur", "Le dernier tournant", "Cavalcade d'amour" et "L'intruse" sorti en France en 1943). Frappée d'indignité nationale, elle mourra de tuberculose alors qu'elle n'aura pas encore 29 ans.
Carole Wrona excelle dans la description de cette période artistique étrange que finalement peu de livres de cinéma évoquent. Le voyage dans ce passé est l'histoire d'une jeune femme qui n'a que son rêve en poche : devenir une star du 7ème Art. En véritable historienne, et parfois en romancière qui s'imagine les pensées de l'actrice, l'auteur de ce livre très documenté ne condamne ni ne juge son "héroïne" perdue, dont le physique atypique de grande blonde effilée traverse l'écran comme un diamant à travailler. C'est avec un talent encore maladroit que Corinne Luchaire séduit les critiques, fait les couvertures de magazine spécialisés, et attire les spectateurs qui ont besoin chaque jour de sortir de leurs torpeurs. Pour le lecteur, toutefois, le trouble est insistant : un destin romanesque et cinématographique, certes, mais Corinne Luchaire était-elle une grande actrice ? Restera-t-elle dans les mémoires indépendamment de ses errements ? L'Histoire, celle du cinéma cette fois, a tranché.
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