dimanche 17 juillet 2011

"Le jour où Gary Cooper est mort" de Michel Boujut - Editions Rivages

Michel Boujut avait quelques compte à régler. Avec son passé, son histoire... Critique cinéma vénérable ("Charlie Hebdo", "France Culture", "Telerama", Paris Première, etc.), cocréateur de la mythique, indispensable et seule véritable émission TV sur le 7ème Art à la télévision, "Cinéma, Cinémas", il livre son fardeau d'une vie. C'est lui qui le dit. Boujut était d'une génération qui va connaître la guerre. Celle d'Algérie. Celle qui, jeune soldat en service commandé, lui fera décider qu'il ne s'agit pas de la sienne. Il sera déserteur... décidé.

C'est à ce retour en arrière auquel nous convie l'auteur. Emblématique des conflits d'une jeunesse avec elle-même de la fin des années 50 et du début des années 60, c'est l'histoire d'un homme qui justifie son acte ultime d'un pays en guerre. En défiant la société avec un "non" à ce bourbier qui se voile la face, Boujut nous raconte sa conscience de jeune homme et sa vie d'homme en devenir. "Le jour où Gary Cooper est mort" est une thérapie qui permet à son auteur de reprendre à zéro le processus intellectuel d'une décision qui le marquera au fer rouge. C'est aussi le retour à une histoire familiale touchante marquée par les deux "grandes" guerres (la 1ère et la 2nde) qui verront son grand-père et son père aux prises avec des destins tragiques et dont l'auteur garde une trace indélébile.

Eloge de l'indépendance d'esprit, ce livre est aussi l'histoire d'un homme qui devra longtemps vivre discrètement, voire caché, et qui n'aura que pour seule thérapie les salles obscures. Lieu de paix et de découverte de ses propres sentiments par excellence, le cinéma sera pour Michel Boujut une porte de sortie salvatrice qui ouvrira encore un peu plus son espace des considérations et des combats du monde. J'aurais sans doute aimé que le critique parle un peu plus des films de sa vie, qu'il nous plonge dans sa passion, mais en liant intimement son parcours d'être humain à l'Histoire de France, il a fait le choix de la confession remarquablement bien écrite des échardes qui lardent son âme meurtrie. En homme debout, peut-être a-t-il maintenant trouvé sa paix intérieure peu avant son décès en mai dernier... Une lecture qui reste toutefois un peu lointaine. Générationnelle, sans doute.

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