lundi 27 septembre 2010

"Suite(s) impériale(s)" de Bret Easton Ellis - Editions Michel Laffont


Allez, il faut bien le dire. On se frotte les mains lorsque la sortie d'un nouveau livre de Bret Easton Ellis vient agrémenter la rentrée littéraire. Il n’y en a pas des tonnes, de ces auteurs dont on attend plus ou moins impatiemment la prose. Le voilà. Et pas besoin de noyer le poisson, le nouveau cru m'a un peu laissé sur ma faim. En posant ses valises auprès d’une simili suite à son 1er roman Moins que zéro sorti en 1986 (en France), Easton Ellis retrouve 25 ans après des personnages à qui il avait donné corps pour en faire aujourd'hui des potiches hollywoodiennes.

Ainsi, Clay est-il devenu scénariste à succès et revient à Los Angeles pour suivre de près le casting d'un film tiré d'une de ses histoires. Chemin faisant, il croise ses très anciens compagnons de vadrouille et ses anciennes amours englués dans le système vain du made in showbiz, où se mélangent ego, vanités, vacuité et chirurgie esthétique. L'auteur est ici à son aise. Il braque sa plume acérée sur un microcosme mis sous la coupe des apparences, de l'ennui et même de la puérilité. Easton Ellis excelle dans les bavardages ineptes et creux, où les dialogues de circonstances n'ont d'autres buts que de nous jeter à la figure l'extrême abandon intellectuel et affectif dont sont affublés ses personnages.

Et même si une histoire d'amour forcément contrariée se dessine, l'auteur met toute son énergie à un travail de sape qui adopte un style minimaliste et glacial pour que tous les tourments de Clay ne soient qu'un jeu de dupes qui n'aura qu'un seul but : plaquer noir sur blanc cet assourdissant silence de la solitude. Puis, l’histoire de ce (trop ?) court roman s’emballe dans le sanglant… Comme pour nous sortir de la torpeur et nous faire prendre conscience que les corps ne sont pas uniquement des poupées silencieuses et désarticulées. Clay est-il le Diable, finalement ? Mais tout cela à un coût. Pour le lecteur. Celui de ne pas toujours comprendre le but recherché. Il n'est pas aisé de trouver sa place face à un livre qui assène les banalités crasses d'une comédie communément humaine. Le lecteur essaie d'être le spectateur attentif du vide pour s'en émanciper, pour tenter de sublimer ce néant. L'auteur nous met au travail. C'est à la fois tentant d'être mis autant à contribution et ennuyant d’escalader cet Everest.

Longue interview de l'auteur

8 commentaires:

Joelle a dit…

Je n'ai lu qu'American psycho de cet auteur, bien que j'ai un ou deux autres titres de lui dans ma PAL ! Je n'avais été que moyennement convaincue par ma lecture mais comme cela fait longtemps, mes souvenirs sont plutôt flous ! Disons que je n'arrive pas vraiment à entrer dans cet univers fait de vacuité, d'ennui et d'errance qu'il avait créé dont même les scènes chocs n'avaient pas réussi à me secouer.

Ys a dit…

Je viens de lire "Moins que zéro" et je ne suis pas certaine de vouloir connaître la suite du destin de ces personnages. J'ai lu difficilement "American Psycho" il y a quelques années, je relirai certainement Ellis, peut-être plutôt avec "Lunar Park".

Theoma a dit…

C'est incroyable comme il s'est fait descendre au USA et comme il est encensé en France.

Anonyme a dit…

C'est dommage d'avoir lu la suite avant le premier épisode. Je le conseillerai à personne sans avoir lu "Moins que zéro" avant. Le principal intérêt de cette suite tient à l'évolution de Clay. Je trouve tout le reste - intrigue comprise - assez secondaire (d'ailleurs Blair, Rip et consorts sont très rapidement expédiés) dans le roman comparé au personnage de Clay qui bouffe toutes les pages. Ce qui explique sans doute qu'il se fasse flingué ici et là (enfin surtout outre atlantique). Je vois tellement de choses incarnées en Clay qu'au final j'y ai trouvé mon compte même si je préfère "Moins que zéro" sur la forme.

Marie a dit…

Jamais lu cet auteur !

LVE a dit…

< Joëlle : "American Psycho" a quand même bien plus de force et d'impact. Il y a un tel ryhtme hypnothique. Une vraie réussite !
< Ys : j'ai adoré les 3/4 de "Lunar Park", puis le livre bifurque dans des contrées qui ne m'ont plus emballé plus que ça...
< Aircoba : je trouve dommage et dommageable d'avoir à lire un précédent livre pour s'approprier un nouveau, 24-25 ans après.
< Marie : allez, un effort, quoi ! :))

May a dit…

J'ai commencé Lunar Park le we dernier. Pas mal mais je ne suis pas non plus super captivée... A voir donc.

dasola a dit…

Bonjour LVE, personnellement j'ai lu ce roman très vite mais il ne m'en reste pas grand-chose. La vie de ces personnages est creuse et ne me touche pas du tout. Je n'ai pas compris ce que voulais nous dire BEE. Bonne journée et félicitations pour le bébé.